• FLOP CINE 2014 - JUST A WORD

     

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Blackstorm de Steven Squale 

    Ah, le film catastrophe. On y a droit chaque année et pourtant, chaque année, une nouvelle daube s'impose. Blackstorm vient nous rappeler qu'un film peut avoir l'air spectaculaire dans une bande-annonce mais intégralement ridicule dans le réel. Ce long-métrage, en plus d'avoir des effets spéciaux de 30 ans de retard, propose une histoire à l'américaine pure et dure à base de famille unie, de sauvetage héroïque d'ados en chaleur sans oublier le petit couplet délicieux sur le patriotisme et l'altruisme en fin de film. Si seulement Steven Squale pouvait prendre la prochaine tornade...
    CRITIQUE


    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Pompéi de Paul W.S Anderson

    En parlant de réalisateur qui devrait finir dans une tornade, l'américain Paul W.S Anderson figure en bonne place. Délaissant un peu ses zombies de Resident Evil - une saga mythique s'il en est... - Anderson tente de mixer 300 et Gladiator mais en version leaderprice. Pour remporter encore davantage les suffrages du grand public, il rajoute une catastrophe avec l'éruption de Pompéi. Clairement adressé à un public de jeunes pucelles en chaleur qui ont pris leur premier orgasme devant le regard ténébreux mais vide de Kit "Snow" Harrington, Pompéi est un navet exceptionnel. Non seulement il s'affirme comme un plagiat éhonté de l'intrigue de Gladiator mais en plus il est bourré de choses ridicules, à commencer par une obsession pour les chevaux tout à fait embarrassante. On ne le répétera jamais assez, non, des abdominaux ne font pas un bon film.
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    The Amazing-Spiderman 2 de Marc Webb

    The Amazing-Spiderman 2 résumé en une seule image : Spiderman avec un casque et une lance de pompier. Non content d'avoir trouvé un nouveau Peter Parker aussi crédible qu'un coton-tige usagé, Marc Webb nous noie sous un déluge de blagues douteuses. Pour compléter le tableau, le monsieur n'hésite pas à détruire une des séquences les plus mythiques de l'homme-araignée et à retourner aux sources du kitsch avec un méchant que l'on croirait sorti d'un cauchemar de Joel Schumacher. On rigole encore de Paul Giamatti en Rhino. Lui par contre, c'est nettement moins certain.
    Une authentique honte.
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Godzilla de Gareth Edwards

    On imagine d'ici le brainstorming pour les producteurs d'Hollywood :
    - Dites-donc, ça fait longtemps qu'on a pas fait un film avec un très très gros monstre ?
    - Ah mais carrément, et si on reprenait Godzilla ?
    - Trop trop bien et on le fait réaliser par un p'tit jeune encore bien vu genre Gareth Edwards.
    - Pour la déconne, on montre pas le monstre et on met un japonais dedans ?
    Bah oui, Godzilla promettait énormément dans ses bande-annonces et ses photos (gardez-là, il n'y a que ça à sauver) mais au final, on se retrouve devant un film de catch avec monstres géants, des humains tellement crétins qu'ils feraient passer Christine Boutin pour un Prix Nobel, et une intrigue d'une débilité confondante. Reste une bonne réalisation. M'enfin...
    De toute manière, utiliser de cette façon Elizabeth Olsen, une actrice géniale, devrait être puni par la peine de mort.
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    American Nightmare 2 : Anarchy de James DeMonaco

    Bon d'accord, on se doutait bien qu'après un premier volet désastreux que les chances d'avoir un chef d'oeuvre pour la suite étaient quasi-nulles. Pourtant James DeMonaco fait encore mieux que le premier. Toujours plus débile, toujours plus incohérent, et de surcroît le film se politise. Déjà que sans aucun fond politique c'était difficile, alors là, on frôle l'orgasme nanardesque. Il faut vraiment arrêter d'appeler ce que fait DeMonaco du cinéma...
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Nos Pires Voisins de Nicholas Stoller

    Si vous ne connaissez pas Nicholas Stoller, rassurez-vous, on s'en fout. Second film à exploiter le filon "J'ai un héros avec des abdos, ça va être excitant" et à finir en "Putain, j'ai vomi dans ma bouche", Nos Pires Voisins c'est un peu un amoncellement de clichés de comédies US avec de gentils héros dysfonctionnels, beaucoup de loosers et du gags bien gras. Poussif, parfois embarassant, Nos Pire Voisins prouve qu'un certain pan de la comédie US a très très mal vieilli, Seth Rogen en tête. Il vous restera toujours un Zac Efron qui passe la moitié de son temps torse-nu pour vous consoler.

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    L'institutrice de Nadav Lapid

    Ne croyez pas que le flop se limite aux films grand-public, le cinéma d'auteur a offert également quelques petites perles. Comme L'institutrice de Navad Lapid. Même si le film peut être abréger en "L'instit", vous êtes bien loin de la série-télé française. Vous y croiserez un enfant-poète qui fait (vraiment) flipper et qui débite de la poésie comme un Verlaine à l'âge de 5 ans, une institutrice psychopathe dont on ne pige jamais ce qu'il se passe dans son esprit (On pense même qu'elle risque d'en abuser à un moment)  et surtout on s'ennuie cruellement. C'est mignon de chercher à magnifier la poésie et la vision des enfants mais le faire avec des protagonistes totalement flippants et antipathiques tout en maniant sa caméra comme un Kechiche, c'est un peu ridicule. On cherche encore la signification profonde de cette histoire malsaine...(Et toujours celle d'Holy Motors, si vous en avez une au passage...)

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Puzzle de Paul Haggis

    Haggis avait déjà volé son oscar malgré le fait que son Collision n'était pas aussi mauvais qu'on avait bien aimé le clamer ici ou là. Aujourd'hui, il persiste dans le film-choral en tentant de monter une méga-intrigue qui tue mais qui fait flop au bout d'une heure. Malgré la présence d'un excellent Liam Neeson et d'une Olivia Wilde intégralement à poil, Puzzle a tout du film froid, bancal et totalement raté. On retient particulièrement l'arc italien avec Brody, monstruosité de débilités et de kitsch. Haggis oublie purement et simplement qu'une histoire dramatique doit receler une certaine émotion. Dénué de celle-ci, son film devient un exercice de style vain, mal fichu et pour tout dire, désolant.

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Albert à L'ouest de Seth McFarlane

    Après son excellent Ted, McFarlane se met en scène dans Albert à l'Ouest. Piètre acteur, l'américain révèle également qu'il est infoutu de faire autre chose qu'un humour très très lourd et doublement gras. Ridicule au possible, son Albert à L'ouest n'a aucun atout convaincant, et surtout pas son intrigue cousue de fil blanc. Un vrai et beau flop à éviter à tout prix.
    Dire que Neil Patrick Harris a joué dans cette chose et dans le génial Gone Girl la même année...On appelle ça un grand écart.
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Monuments Men de George Clooney

    Partant d'un très bon sentiment, Monuments Men synthétise tout ce qu'il ne faut pas faire dans un film de guerre. Avec son intrigue morcelée et extrêmement mal ficelée, ses personnages à peine esquissés et son quota Jean Dujardin poussif, ce film-hommage se loupe sur le point crucial qu'est l'empathie. Parce qu'au final on se contrefout largement des personnages présentés par le film. Immense déception et immense flop pour le dernier métrage d'un réalisateur pourtant jusqu'ici extrêmement prometteur !

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Le Hobbit : La bataille des cinq armées de Peter Jackson

    Qu'est-il arrivé à Peter Jackson ? Son dernier opus cloture la trilogie du Hobbit de la plus honteuse des façons. Pourri jusqu’au trognon par des effets spéciaux en synthèse omniprésents, étiré de façon éhontée sur 2h30 sans avoir rien ou presque à raconter, La bataille des cinq armées est, de loin, le plus grand flop de l'année. Un flop d'autant plus rageant qu'on se souviendra longtemps de la superbe prestation de Martin Freeman en Bilbo. Les fans du seigneur des anneaux sont en deuil, et on les comprend.
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Transformers 4 de Michael Bay

    Y'a des Robots géants qui se transforment en camions et qui chevauchent des Dinosaures quoi !
    HAHAHA
    CRITIQUE


    DECEPTIONS CINE 2014 - JUST A WORD

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Flore de Jean-Albert Lièvre

    Malgré son postulat de départ extrêmement intéressant, le documentaire de Jean-Albert Lièvre se fait militant anti-médecine et flingue sans discernement le milieu médical. Occultant la moitié des choses autour de la prise en charge des patients Alzheimer et se posant en moraliste agaçant, Jean-Albert Lièvre gâche un magnifique témoignage sur l'amour que porte un fils à sa mère malade et sur le retour à la vie d'une vieille dame revenue dans son île natale. Du gâchis, tout simplement.
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Under The Skin de Jonathan Glazer

    On a envie de l'aimer ce film étrange et singulier de Glazer. Porté par une Scarlett Johansson impressionnante, le long-métrage s'embourbe pourtant dans une sorte d'auteurisme abrutissant et se drape dans un hermétisme totalement contre-productif. Le résultat est d'autant plus décevant que derrière le rythme atrocement lent de l'histoire se cache un certain nombre de qualités indéniables, à commencer par ce traitement des plus originaux d'une forme de vie étrangère. Un film poliment chiant qui aurait pu être bien plus fascinant en étant bien moins radical.
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Horns d'Alexandre Aja

    Le réalisateur français du génial remake de La Colline a des yeux avait toutes les cartes en mains ou presque pour offrir un film fantastico-horrifique captivant. Malheureusement, piégé par l'écrit original d'un Joe Hill dérangeant dans sa vision catho puante lovée au sein d'un emballage faussement rebelle, Aja échoue et tombe même dans le ridicule à l'occassion d'un affrontement final risible. Malgré un Daniel Radcliffe impliqué, Horns ne peut éviter les clichés Hollywoodiens habituels. Le réalisateur français finirait-il par passer du côté obscur ?
    CRITIQUE

    [Flop] Bilan Cinéma 2014

    Transcendance de Wally Pfister

    Alors que le pitch de départ et la présence de Johnny Depp promettaient énormément, Transcendance n'apporte en fait rien à la SF sur grand écran. Sorte de mix bancal entre Animatrix et Terminator, sans parler de l'invasion des profanateurs de sépultures, jamais le film n'arrive à faire vivre correctement ses protagonistes. Alors qu'il embauche une pléiade d'acteurs géniaux, le réalisateur n'en fait simplement rien du tout. Achevons la chose avec des incohérences vraiment dérangeantes et l'on arrive à une cruelle déception, malgré un certain nombre de bonnes idées malheureusement rapidement oubliées.
    CRITIQUE


    votre commentaire
  • [Critique] Mr Turner


    Parmi les concurrents sérieux à la Palme d'or 2014, Mr Turner figurait en bonne position. Le britannique Mike Leigh livrait à la Croisette un film de près de 2h30 sur la vie du peintre Joseph Mallord William Turner, l'un des plus grand artistes anglais et précurseur de l’impressionnisme. Pour esquisser ce portrait, Leigh fait appel à Timothy Spall, un acteur que l'on a absolument pas l'habitude de voir en premier rôle mais qui a subjugué le jury Cannois au point de repartir avec rien de moins que le Prix d'Interprétation masculine. Cette impressionnante fresque volontiers contemplative arrive donc en France avec, comme on s'en doute, un public cible assez restreint. Mr Turner mérite-t-il que l'on passe plus de deux heures dans une salle obscure ?


    Artiste reconnu, membre de la Royal Academy of Arts, J.M.W. Turner a une solide réputation d'excentrique dans le milieu. Souvent en voyage, de l'Ecosse à l'Italie en passant par la France, le britannique revient au domicile de son père pour reprendre sa peinture. Pris entre les reproches de son ex-femme, de ses enfants et même de ses collègues, il tombe amoureux de Caroline Booth, une veuve pleine de compassion et d'attention. Mais petit à petit, la santé du peintre se dégrade. Celui qui n'hésite ni à cracher sur ses tableaux ni à les poinçonner au rouge va devenir la risée de ses contemporains, tourné en ridicule par divers spectacles comiques et rejeté par la famille royale. Envers et contre tout, Turner continue pourtant sa peinture , recherchant inlassablement une nouvelle scène à capturer avec son inséparable carnet de croquis. 

    Film imposant, fresque monstrueuse, Mr Turner va laisser plus d'un spectateur sur le carreau. Mike Leigh choisit d'évoquer les dernières années de vie du fameux peintre alors que sa notoriété est déjà bien établie. Il s'évertue pendant la première heure à mettre en place ses protagonistes avec, en premier lieu, J.M.W Turner, peintre bougon, renfermé et franchement peu sympathique au demeurant. Autour de lui gravite un certain nombre d'individus, à commencer par son père, d'une importance extrême pour Turner, ou la bonne, personne tragique s'il en est. le réalisateur britannique nous offre non seulement une brillante et passionnante galerie de protagonistes mais insiste également comme il se doit sur l'époque historique ( le XIXème siècle). Magnifique reconstitution historique, jamais prise en défaut et constamment enivrante, Mr Turner nous plonge dans une Angleterre délicieusement surannée où haut-de-forme et canne-parapluie font bon ménage. Pour ne rien gâcher, la mise en scène de Leigh est positivement magnifique, le réalisateur composant de véritables tableaux vivants à de nombreuses reprises, sorte de façon sournoise pour nous faire entrer dans la tête du célèbre peintre.

    Il faut savoir à ce stade que la film repose entièrement sur Turner et nul autre. On croise, c'est vrai, d'autres personnages superbes comme ce peintre raté et méprisé ou cet arrogant aristocrate anglais qui se prend pour un éminent critique, mais on suit surtout et avant tout l'artiste britannique. On comprend dès lors que le métrage tout entier repose sur les épaules de son premier rôle, Timothy Spall. Formidable de bout en bout, carrément exceptionnel pour tout dire, l'acteur interprète avec un talent rare un personnage à première vue tout à fait antipathique, ou presque. Grognements à profusion, sourcils froncés, bouche tordue, Spall traverse le métrage avec un charisme et une présence monstrueuse. Son prix d'interprétation s'en trouve amplement justifié tant l'acteur semble habité par son rôle. Mais cette simple représentation du peintre ne serait pas complète sans une vraie réflexion autour de son oeuvre et de sa fin de carrière. Une chose que Mike Leigh a parfaitement assimilé et qu'il s'évertue à retranscrire dans son long-métrage.

    Depuis la première et superbe scène d'ouverture avec un Turner pensif décalquant un lever de soleil jusqu'à ce final où il tente de copier le cadavre d'une jeune fille noyée, Mike Leigh évoque un homme rude, peu enclin aux grandes épanchements sentimentaux mais doué pour une chose bien particulière : capturer ce qu'il voit. Un maître de l'observation pour tout dire. Continuellement armé de son petit carnet de croquis, toujours à la recherche d'un meilleur point de vue, l'artiste capture l'essence de ce qu'il voit pour lui redonner vie sous ses coup de pinceaux. Son extraordinaire talent n'en reste pourtant pas moins impressionnant et ce malgré les quolibets qu'il subit vers la toute fin de sa carrière. Ce qui finit d'ailleurs d'étonner c'est l'habilité de Leigh pour nous attacher à un personnage dans le fond très contestable. Fuyant sa famille - il renie quasiment ses deux filles - délaissant et utilisant la bonne sans lui laisser la moindre marque d'affection ou de reconnaissance, il faut avouer que Turner est loin d'être un individu attachant de prime abord. Mais grâce à la subtilité du réalisateur, le peintre devient plus humain au cours de quelques scènes clés comme cette magnifique et déchirante séquence où il éclate en sanglots devant une prostituée ou encore lorsqu'il avoue ses sentiments à la veuve Booth. Malgré ses apparences, Turner ne peut être rangé dans une case, il le refuse d'ailleurs déjà dans ses œuvres. Le seul vrai reproche que l'on puisse faire à Mr Turner, c'est sa colossale longueur qui, pour tout dire, épuise rapidement le spectateur. D'un ennui poli parfois, et malgré l'étrange attraction qu'exerce Spall, Mr Turner s'avère trop long et s'appesantit parfois trop sur certains traits de caractère du peintre que l'on avait déjà largement cerné. C'est pour cette raison que le film sera difficile à conseiller à tous les spectateurs et il faudra très certainement une bonne dose de patience et/ou un intérêt particulier pour le sujet pour aller au bout de ce film-fleuve.

    Oeuvre impressionnante mais trop longue, Mr Turner jouit non seulement d'une mise en scène picturale sublime mais également d'une description minutieuse et captivante d'un peintre non moins fascinant. Ajoutez-y une prestation divine de Timothy Spall et vous obtenez un long-métrage passionnant et hautement recommandable pour peu que le sujet et sa longueur ne vous découragent pas.

    Note : 8.5/10

    Meilleure scène : La visite chez les prostituées

    Meilleure réplique : "Sun is god"


    P.S : Notez que le film, excepté le Prix d'Interprétation masculine, n'a rien remporté à Cannes. Lorsque l'on voit qu'un film aussi médiocre et dénué d’intérêt que Les Merveilles d'Alice Rohrwacher a remporté le Grand Prix, on se demande ce que pouvait avoir à l'esprit le jury cannois...


    votre commentaire
  • [Critique] Le Hobbit : La bataille des cinq armées


    Après La désolation de Smaug, un second volet en demi-teinte, Peter Jackson achève sa trilogie consacrée à Bilbo le hobbit. Autant dire qu'après le ventre mou du deuxième opus, toutes les craintes étaient permises pour ce final. L'idée de base, adapter un livre de 200 pages en 3 films de 2h30, était franchement une des plus mauvaises de la décennie (oui, il y a pire, comme adapter Twilight ou Hunger Games). Comment garder un souffle épique et une histoire captivante sur une durée aussi étirée ? Si le tout premier film était encore très bon et renouait avec la magie de son illustre aîné, force est de reconnaître qu'au moment de la sortie de la bataille des cinq armées, les choses sont beaucoup plus compliquées. En y ajoutant le fait qu'une grande partie du film s'emploie à recycler les appendices du roman... bref, l'appréhension gagne le plus fervent fan du travail du néo-zélandais. Les craintes sont-elles fondées ?


    Smaug a été réveillé. La compagnie des nains menée par Thorin Ecu-De-Chêne a réussi à échapper au dragon... pour mieux le jeter sur Lacville. Alors que Bard s'apprête à défendre sa ville, Bilbo et les nains assistent impuissants au désastre. Au-delà de l'apocalypse déchaînée par le dragon, la Terre du Milieu bruisse de l'extraordinaire nouvelle : Smaug n'est plus dans la montagne solitaire. Les elfes, les nains, les orcs et les hommes se préparent tous à fondre sur le trésor inestimable enfoui sous la roche. Pris au piège entre les cinq armées, comment un cambrioleur hobbit peut-il espérer changer le destin de ses amis et de son monde ? La fureur de la guerre approche et les nains fourbissent leurs armes, la lutte promet d'être âpre.

    On ne le cachait pas en introduction, l'idée d'adapter en 3 volets le livre du Hobbit était une idée désastreuse dès le départ. La raison en est simple : il n'y a pas assez de matériel pour ça. Une chose que l'on sentait énormément dans un bon tiers du second volet. C'est donc tout à fait logique que, pour ce dernier opus, cette espèce d'étirement ad nauseam finisse par tout détruire. Voilà, le mot est lâché. La bataille des cinq armées constitue une des plus grandes déceptions des dernières années, et pire, un film médiocre. Que l'on puisse être déçu par le métrage, c'est une chose, mais que celui-ci se révèle être proche du ratage total, c'en est une autre. Expliquons à présent pourquoi.
    D'abord pour le choix totalement putassier de la coupure du second film juste avant l'attaque de Lacville par Smaug. La résolution de cet arc tant attendu tient en réalité... sur dix minutes. Avant d'enchaîner sur la question centrale du récit : qui va avoir le trésor ? Et là, on sent d'emblée que Jackson n'a plus rien à dire - ou presque - sur les 2h30 qu'il lui reste. On passe par les conséquences sur les hommes survivants de Lacville de façon totalement artificielle, on ergote sur la position délicate des nains... et on en profite pour revenir vite fait sur Sauron et Gandalf... parce qu'on n'a pas grand chose d'autre à dire et qu'en fait, on ne sait pas trop comment en reparler. Cette séquence synthétise presque intégralement le film. On est touché d'un côté par la nostalgie de revoir les "anciens" mais de l'autre, les effets spéciaux sont tellement omniprésents et voyants, le dramatisme tellement appuyé et les choses tellement mal emboîtées qu'il ne reste rien pour nous réjouir véritablement. Entre les parodies de spectres (d'un kitsch hallucinant) et le surjeu de Blanchett en Galadriel (pourquoi elle reste à terre mais pourquoi ?), sans même évoquer les sempiternels "ses forces l'abandonnent" pour faire plus dramatique... Non, c'est à pleurer.


    Le reste du métrage se révèle tout à fait semblable. Jackson étire de façon éhontée son récit et brode, brode, et brode encore. On en finit plus avec les préparatifs pour la bataille, puis celle-ci arrive et on nous offre une overdose de baston. Le pire là-dedans, c'est que même si le design des créatures et leur diversité offrent un festival d'idées conceptuelles aux spectateurs, il ne reste rien du tout de la mise en scène épique en diable du Seigneur des Anneaux. Cette fameuse bataille des cinq armées n’est jamais crédible, le rapport des forces totalement aberrant, la stratégie envolée et il suffit d'une dizaine de nains pour retourner la situation alors que, deux secondes auparavant, les gentils se battaient à 10 contre 1. C'est franchement pas 10 nains qui vont tout bouleverser. Où sont les grandioses séquences du Gouffre de Helm, la charge héroïque du Pelennor ou le dernier carré de la Porte Noire ? Plus le récit avance, plus il se noie dans sa volonté de surenchérir à tout prix pour faire oublier son absence de consistance scénaristique. Jackson se heurte au néant de ce qu'il raconte. Et le spectateur s'emmerde, littéralement. On filme une ou deux scènes avec Legolas en mode super-héros, ridiculisant un peu davantage le personnage devenu un simple "fils rebelle". On ajoute aussi un side-kick à la débilité crade en la personne de Alfrid... chaque séquence sur ce personnage accentue l'embarras du spectateur... Et puis, on prolonge la ridicule histoire d'amour du film qui s'achève dans un océan de niaiseries.

    Mais pire que tout, Jackson achève sa transformation initiée dans la Désolation de Smaug en obsédé de la synthèse. Tout, ou presque, est filmé sur fond bleu, avec des monstres et des environnements en synthèse. Non seulement c'est souvent mal incrusté mais surtout, c'est juste étouffant. Certains plans sont une vraie bouillie de photoshop et d'effets spéciaux clinquants, c'est abominable. Où sont les costumes du Seigneur des Anneaux et sa volonté de rester au moins pour moitié en éléments réels ? Oubliées les maquettes à échelle du Gouffre de Helm, oubliés les costumes d'Uruk-Haïs, bienvenue dans l'ère pathétique du tout artificiel. La beauté des décors de Nouvelle-Zélande ne se retrouve que vers la toute fin et le retour de Bilbo chez lui. C'est d'un triste... d'autant plus triste que la conclusion du film retrouve en un sens la beauté et le charme de la trilogie du SDA. Une petite note déchirante de nostalgie qui rappelle à quel point il y a plus de 10 ans aujourd'hui, Peter Jackson était doué. Après le spectacle auquel on a assisté, on reste hébété. On cherche les quelques bonnes choses à retenir. L'armée des nains, bien classe. Quelques tête-à-tête entre Thorin et Bilbo, ou Bilbo et l'un des nains, séquences qui renouent avec la justesse d'antan. Et puis une dernière chose...

    Bilbo lui-même. Martin Freeman mérite bien mieux que ce que l'on a fait de son personnage. Rendez-vous compte, pour un métrage qui s'intitule Le Hobbit, Bilbo est relayé en arrière-plan dans un rôle de personnage secondaire. Si Thorin bouffe l'écran, il ne retrouve un tant soit peu de majesté que lors de sa séquence finale, bien plus touchante que tout le reste. Mais revenons à Bilbo qui demeure, malgré tout, une pure réussite et cela grâce à Freeman qui incarne à la perfection le cambrioleur le plus célèbre de la Comté. Ses mimiques, ses tics et simplement son attitude générale, tout concourt à faire de lui la meilleure incarnation des petits habitants aux pieds velus. L'immense injustice, c'est qu'il restera éclipsé par Frodon dans les années à venir, non pas parce qu'il manque de talent, mais simplement parce qu'il a le malheur de jouer dans une trilogie qui s'épuise dès le second volet. Il était donc plus que nécessaire de rendre honneur à l'interprétation magistrale de l'anglais. Les autres acteurs ne sont pas forcément mauvais, soyons bons joueurs, mais jamais on ne retrouve l'éclat des personnages flamboyants du Seigneur des Anneaux. Au fond, on a l'impression de se retrouver face à un blockbuster lambda où l'action sert de prétexte pour faire payer le spectateur, encore une fois. Une dernière fois, espérons-le.

    Immense, monumentale déception que ce dernier volet du Hobbit. On en ressort en colère contre ce qu'a fait Jackson de sa mémorable trilogie originelle. Mais aussi triste. Triste de voir qu'un réalisateur qui avait une voix si particulière s'est laissé entièrement bouffer par le système. Noyé par ses effets spéciaux, anémique sur le plan scénaristique et même ridicule à plusieurs reprises, La bataille des cinq armées rappelle une autre magistrale déception. Peter Jackson a rejoint son illustre prédécesseur, George Lucas. RIP.

    Note : 2/10

    Meilleure scène : le retour dans la Comté


    votre commentaire
  • [Critique] White God


    Les OFNIs venus de l'Est n'en finissent plus d'étonner. Après l'Ukraine et The Tribe, c'est au tour de la Hongrie et White Dog de faire une entrée remarquée sur les grands écrans français. Précédé par un puissant buzz critique depuis Cannes et Un Certain Regard où il a raflé le Prix de la sélection, White God joue sur un tableau totalement inattendu : le film animalier en tant que satire sociale. Avec des acteurs totalement inconnus sous nos latitudes et un réalisateur qui change radicalement de registre en la personne de Kornel Mundruczo, le long-métrage fait des choix tout à fait audacieux. A commencer par la vedette de son récit qui n'est pas vraiment celle que l'on pensait être. 


    Lili a 13 ans et doit, tant bien que mal, vivre avec son père pendant que sa mère part en voyage. Pour tenir le coup face à un homme qui semble bien froid, elle peut compter sur Hagen, son chien bâtard et véritable molosse au demeurant. Seulement voilà, la Hongrie a fait passer une loi pour favoriser les chiens des races et tout propriétaire de bâtard doit s'acquitter d'une taxe. Rapidement, Hagen devient une charge inutile pour le père de Lili qui finit par l'abandonner en bord de route. C'est l'acte fondateur d'une révolte canine qui risque bien de tourner au jeu de massacre.

    Peut-être l'un des films les plus radicaux de cette année, White Dog fait partie de ces métrages qui vont jusqu'au bout de leurs intentions. Contrairement à ce que laisse présager le début, il ne s'agit pas d'une quête à la Disney d'une jeune fille pour retrouver son toutou adoré. En réalité, depuis le commencement, l'histoire est celle d'Hagen, véritable héros... si l'on peut dire. Au bout d'une vingtaine de minutes, White Dog abandonne carrément et simplement ses protagonistes humains pour se centrer entièrement autour du chien. On assiste alors à une multitude de séquences surréalistes où Hagen rencontre d'autres chiens errants, prend la tête de la bande, échappe aux gens de la fourrière, se retrouve prisonnier et ainsi de suite. Sans parole, juste entrecoupé par les aboiements des corniauds qui occupent l'écran. Attention, il ne s'agit pas d'une sorte d'Incroyable Voyage avec des animaux courageux et attachés à leur maître mais bien d'une intrigue à part entière, sauvage, dure et parfois révoltante. La violence est omniprésente dans White Dog, notamment celle que font subir les hommes aux animaux. Mundruczo ne souhaite pas épargner son public et ne fait aucune concession. Dans ce sens, le métrage reste très loin des productions grand public qu'on pourrait croiser autour des animaux. Rassurez-vous, aucune bête n'a été blessée durant ce tournage, malgré la rudesse de certaines scènes.

    Le versant humain du film reste donc congru mais tout à fait pertinent. La quasi-majorité des protagonistes humains sont dépeints d'une façon bien peu flatteuse, voire carrément dégoûtante. Du père égoïste à l'éleveur de combat, en passant par la logeuse acariâtre, on peut même carrément affirmer que l'histoire ne trouve aucune qualité au genre humain. Cette démonstration par l'absurde de la brutalité et de la vanité de la société permet de remettre en place également des bêtes qui n'en ont pas les atours. Au fur et à mesure que le récit avance, on se demande de plus en plus ouvertement qui de l'homme ou du chien est le véritable animal. Ce n'est certes pas non plus un message tout à fait neuf mais la radicalité avec laquelle il est envisagé force le respect. Surtout que le réalisateur hongrois sait très bien filmer et mettre sa ville en valeur, à commencer par sa scène d'ouverture impressionnante qui n'est pas sans rappeler une certaine séquence de 28 Jours plus tard de Boyle. D'ailleurs, on retrouve d'autres similitudes avec les films d'horreur comme Les Oiseaux de Hitchcock où les volatiles seraient remplacés par une meute de chiens errants écumants de rage.

    Dans le fond, White Dog tient autant de la satire sociale et du plaidoyer contre la cruauté animale que du film d'horreur et du récit initiatique. Hagen est érigé en héros, voire en anti-héros, par Mundruczo qui finit pat l'iconiser en vengeur divin. Oui, un chien. Ce refus d'abandonner son postulat de départ jusqu'à l'extrémité de son récit et cette conclusion magnifique et poétique desservent autant le métrage qu'ils lui insufflent une grande originalité. En effet, dans son envie d'aller au bout des choses, le réalisateur hongrois tombe dans une succession de scènes de vengeance certes jouissives mais bien trop longues, une ou deux auraient amplement suffi. Ainsi, White God traîne en longueur sur sa dernière partie et finit un tantinet par agacer. Une petite coupe aurait fait le plus grand bien au métrage. Cela n'enlève bien entendu rien à l'audace filmique qui caractérise le récit de Mundruczo.

    On nous avait annoncé un OFNI, et c'est bien un OFNI que se révèle être White God. Certainement trop long et pas forcément facile à aborder, le long-métrage de Kornel Mundruczo reste pourtant un sacré moment à vivre au cinéma, ne serait-ce que pour assister à un drame porté par les seules épaules d'un chien - qui a d'ailleurs décroché la Palm Dog ! - mais aussi pour découvrir une curiosité filmée avec talent et audace. 

    Note : 8/10

    Meilleure scène : La scène finale





    votre commentaire

  • TOP CINE 2014 - JUST A WORD

    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    10- Noé (Noah) de Darren Aronosfky

    Darren Aronofsky sortait à peine de son Black Swan que déjà il repartait pour un tout autre univers. Contrarié par l'aventure The Fountain, Aronofsky adapte à nouveau sa propre bande-dessinée mais cette fois avec le casting et le budget qu'il désire. Contrairement aux attentes, Noé ne se contente pas de reprendre le mythe biblique mais y ajoute de la pure fantasy avec les Nephilims. Non seulement le film surprend par son ampleur et sa maestria - la bataille de l'Arche avec le dernier carré des Anges Déchus donne des frissons - mais en plus, il ruse pour détruire avec malice l’archaïsme de l'enseignement biblique pour accoucher d'un authentique film subversif. Rajoutez à cela un Russel Crowe qu'on n'avait pas vu aussi inspiré depuis Gladiator et vous voilà devant une petite prouesse.

    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    9 - La Grande Aventure Lego (The Lego Movie) de Phil Lord & Christopher Miller

    Un film Lego, sans rire ? Personne n'y croyait lors de son annonce et pourtant le film a explosé toutes les attentes, croulant sous les éloges de la presse. Mais avec Phil Lord et Christopher Miller, les géniaux comparses déjà responsables de 21 Jump Street, il faut s'attendre à tout...même à voir le métrage se hisser dans le top 10 des meilleurs films de l'année. Animation fabuleuse, bande-son succulente, véritable WTF permanent, le film Lego est surtout une déclaration d'amour aux jeux enfantins et à l'imagination des plus jeunes. Ajoutez-y un tas de références geeks plus savoureuses les unes que les autres et une vraie réflexion sur l'évolution des jouets à l'heure actuelle, et vous obtenez rien de moins qu'une pépite, une vraie. De toute façon, un film avec Batman, Green Lantern, UniKitty, Gandalf et Abraham Lincoln ne peut pas être un mauvais film, c'est impossible.
    Critique

    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    8 - X-Men : Days of the Future Past de Bryan Singer

    On a cru pendant un temps la franchise X-Men morte et enterrée. Après le calamiteux 3ème volet et le non moins désastreux Wolverine Origines, c'est le lancement de X-Men : First Class qui avait sauvé nos amis mutants. Le second opus de la prélogie retrouve son créateur originel avec Bryan Singer qui en avait également bien besoin. Le résultat est à la hauteur des espérances...et même au-delà. En conservant les points forts de son prédécesseur et en centrant son intrigue sur le personnage de Mystic, Singer offre un petit monument du film de super-héros. Mieux encore, il arrive à faire table rase de la précédente trilogie et du malencontreux volet de Ratner. C'est ce que l'on appelle un coup gagnant. Rien que pour la séquence de Quicksilver, le film mérite sa place dans le top de l'année.
    Critique


    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    7 - Boyhood de Richard Linklater

    Pari fou, Boyhood filme sur 12 années l'évolution d'une cellule familiale et raconte avec pudeur et élégance l'enfance puis l'adolescence de Mason. Linklater se penche avec amour sur le passage à l'âge adulte tout en tentant une expérience à nulle autre pareille, construite tout entière auteur de son formidable petit acteur, Ellar Coltrane. C'est beau, c'est intelligent, c'est subtil, et en comme si cela ne suffisait pas, c'est un témoignage générationnel unique en son genre. On frôle dangereusement le chef d'oeuvre tout en redécouvrant un Ethan Hawke qu'on avait un peu tendance à oublier ces derniers temps. Magique.
    Critique

    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    6 - Kumbh Mela, Sur les Rives du fleuve sacré de Pan Nalin

    Petite merveille totalement inattendue, le film-documentaire de Pan Nalin s'arroge la 6ème place du top, rien que ça. Ode au voyage, véritable découverte spirituelle et humaine, Kumbh Mela nous présente une galerie de personnages inoubliables pendant près de deux heures. On vibre, on tremble, on rit, on pleure. Bref, on passe par toutes les émotions possibles. A la fois témoignage de ce que l'homme peut accomplir de plus surprenant mais aussi déclaration d'amour à ce magnifique pays qu'est l'Inde, Kumbh Mela fait partie de ces documentaires qui comptent. En plus, pour ne rien gâcher, c'est beau à en crever. Un bijou.
    Critique


    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    5 - Interstellar de Christopher Nolan

    Nolan tourne les yeux vers les étoiles et c'est Interstellar qui arrive sur nos écrans. L'américain nous offre une aventure spatiale démesurée à l'ambition dévorante. Imparfait mais tellement généreux, le dernier bébé de Christopher offre des images, des séquences et des réflexions ébouriffantes. En refusant le spectaculaire et en recentrant son apocalypse sur une toute petite cellule familiale, Nolan érige l'amour en un élément fondamental de l'univers. Ajoutez-y un acteur monstrueux en la personne de l'oscarisé Matthew McConaughey, secouez-bien et vous obtenez un immense film de science-fiction et d'exploration spatiale comme on en avait pas vu depuis une éternité. Interstellar n'a pas fini de diviser, mais ce qui est certain, c'est qu'il ne laissera personne indifférent.
    Critique

    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    4 - Mommy de Xavier Dolan

    Le jeune prodige est de retour. Après avoir emmené Tom à la ferme et tué sa mère, le québécois Xavier Dolan vient déclarer tout son amour pour les mères. Plus grand public que ses précédents films mais toujours aussi bien filmé, Mommy embarque la clique habituelle à Dolan et donne une occasion en or à Anne Dorval, Antoine-Olivier Pilon et Suzanne Clément de briller comme jamais. Authentique montagnes russes émotionnelles, le long-métrage met (presque) tout le monde d'accord. Celui qui a raté à un cheveu la palme d'or Cannoise cette année remporte la Palme D'or du coeur. Un chef d'oeuvre.
    Critique


    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    3 ex-aequo - Les Gardiens de La Galaxie (Gardians of the Galaxy) de James Gunn

    Second film de super-héros du Top de cette année, les Gardiens de la Galaxie a mis le monde entier sur le postérieur. Certainement pas les plus connus des héros Marvel, les gardiens s'offrent un cinéaste de premier choix avec le geek James Gunn. Extrêmement généreux, jouissif comme pas possible, bourré de scènes cultes en devenir, le long-métrage de Gunn s'impose non seulement comme le meilleur space-op depuis Star Wars mais aussi, et surtout, comme le divertissement le plus enthousiasmant depuis un bail. Porté par cinq personnages au top du top, une BO carrément inoubliable et des effets spéciaux sensationnels, pas besoin d'en dire plus, Les Gardiens de la galaxie, c'est une tuerie !
    Critique

    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    3 ex-aequo - Winter Sleep de Nuri Bilge Ceylan

    Film fleuve de 3h30 (!!), la dernière Palme D'or de Cannes du turc Nuri Bilge Ceylan nous immisce dans l'intimité d'un comédien à la retraite devenu gérant d’hôtel dans un coin reculé de la Turquie. Sous la neige et le vent, Nuri Bilge Ceylan décortique ses personnages et étudie les répercussions improbables d'un acte anodin. Porté par des acteurs sensationnels et une mise en scène aux petits oignons, le film arrive à tenir en haleine pendant toute sa colossale durée. Plongée sur l'homme, la religion et sur l'amour, Winter Sleep redonne foi dans le cinéma d'auteur. Un grand film, tout simplement.
    Critique

    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    2 ex aequo - Only Lovers Left Alive de Jim Jarmusch

    Des vampires pour la seconde place. Mais pas n'importe lesquels. Jim Jarmusch revisite le mythe pour livrer sa propre vision mélancolique des créatures de la nuit. Dépressifs, déclinants mais toujours aussi envoûtants, les seigneurs de la nuit à la sauce Jarmusch écrasent tout ce qui a été fait sur le sujet. Pour les incarner, une pléiade d'acteurs divins avec Tilda Swinton, Tom Hiddleston, Mia Wasichowska et John Hurt. Sur fond de vinyles et de guitares, ces vampires vintages baignent dans l'ambiance brumeuse et délicieuse d'un monde cloîtré où les humains sont vus comme des êtres repoussants et arriérés. De là à dire qu'il s'agit en fait d'un regard de Jarmusch sur la stupidité de ses contemporains, il n'y a qu'un pas. Que l'on franchira avec une joie non feinte.

    [Top] Bilan Cinéma 2014

    2 ex aequo - Whiplash de Damien Chazelle

    Rencontre inoubliable de deux acteurs au sommet, J.K Simmons et Miles Teller, Whiplash c'est aussi le premier long-métrage plein de fougue et d'audace de Damien Chazelle. Parcouru par des séquences à vous faire frissonner, véritable Full Metal Jacket de la musique, Whiplash fait aussi la part belle à une question épineuse : Doit-on souffrir pour réussir ? Malgré son arrivée tardive au cinéma, Whiplash s'offre la deuxième place du top aux côtés de Only Lovers Left Alive, un authentique uppercut !
    Critique

    [Top-Flop] Bilan Cinéma 2014

    1 - 12 Years a slave de Steve McQueen

    C'est la seconde fois que Steve McQueen squatte la tête du top cinéma après le géniallissime Shame. Sacré meilleur film aux oscars, 12 Years a slave est un témoignage d'une immense puissance sur l'horreur de l’esclavage des Noirs. Filmé avec une maestria sans égale, interprété par des acteurs simplement formidable et d'une justesse terrifiante, le métrage de McQueen laisse K.O debout. Dans le jargon, on appelle ça un uppercut cinématographique, le genre de film qui restera dans les annales quelque part entre La Liste de Schindler et Danse avec Les Loups. 12 Years a slave est le meilleur film de l'année 2014, un chef d'oeuvre total aussi intense que sublime. Vous voici obliger de le voir.
    Critique

    Les coups de cœur :

    - Quand vient la nuit de Michael Roskam -- Critique
    - Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée
    - Marie-Heurtin de Jean-Pierre Améris -- Critique
    - Les Combattants de Thomas Cailley -- Critique
    - Gone Girl de David Fincher -- Critique
    - Mister Babadook de Jennifer Kent -- Critique
    - We are what we are de Jim Mickle -- Critique


    votre commentaire
  • [Critique] Astérix - le Domaine des Dieux

    Le dernier Astérix en dessin-animé remonte à 2006 avec Astérix et les Vikings. Côté cinéma live, on préférerait oublier les deux dernières adaptations en date, à savoir Astérix et Obélix au Service de sa Majesté et Astérix aux Jeux Olympiques. Pour faire table-rase du passé - ou presque - Louis Clichy a non seulement pris les rênes de cette nouvelle épopée mais s'est, en plus, adjoint un co-réalisateur et co-scénariste de tout premier ordre en la personne d'Alexandre Astier, certainement l'artiste français le plus passionnant de la décennie écoulée. Cette fois, le dévolu des deux réalisateurs s'est porté sur l'album Le Domaine des Dieux, souvent reconnu pour être un des meilleurs opus concernant nos irréductibles gaulois préférés. En embarquant un casting vocal de tout premier choix et en rajoutant quelques bonnes rasades d'influences Kaamelottiennes, Astérix part avec tous les atouts pour nous offrir un divertissement de grande qualité.

    César n'en peut plus de ce petit village de Gaulois qui lui résiste encore et toujours. Seulement voilà, l'empereur de Rome a encore quelques tours dans son sac. Avec l'aide de son architecte Anglaigus, Jules César demande de construite une ville romaine autour du village gaulois. Son but ? Intégrer tout en douceur ces barbares qui terrifient ses légions. L'appât du gain et la profusion de nouveautés proposées conduisent Cétautomatix, Ordralfabétix et tous les autres à se rapprocher de plus en plus dangereusement du mode de vie à la romaine. Seuls Astérix et Obélix soupçonnent que les choses risquent de mal tourner. Mais au fait, comment se débarrasser de civils romains tout à fait pacifiques ?

    Ce volet des aventures d'Astérix tombe à point nommé. Non seulement parce que la franchise sur grand écran se portait très mal ces derniers temps, mais en plus parce que le sujet du Domaine des Dieux trouve une grande résonance à l'heure actuelle. L'histoire nous plonge dans la destruction d'une culture par un mode de vie fondé sur l'argent, le paraître et l'hypocrisie. Inutile de préciser en quoi cela est tout à fait à l'ordre du jour. Cette critique à peine voilée du capitalisme et de la société moderne se retrouve totalement dans le long-métrage d'Astier et Clichy. Sans non plus écraser leur film avec une tonnes de références contemporaines, les deux compères rendent justice à cette satire mordante de Goscinny qui date pourtant de 1971. Cette charge virulente reste cependant drôle au possible et glorifie une fois de plus l'exception culturelle (à la française ?). Un thème que l'on sait cher aux yeux d'Astier et qu'il ne manque jamais de justifier par son talent.

    Outre son scénario engagé et moderne, Le Domaine des Dieux renoue avec l'Astérix à l'ancienne. Pour se faire, on retrouve un casting vocal aux petits oignons avec les voix de Roger Carel - l'inimitable - pour Astérix himself, et Guillaume Briat pour le truculent Obélix. Mais c'est loin d'être tout puisque les habitués de la clique à Astier sont au rendez-vous. D'Alain Chabat en Prospectus à Alexandre Astier en Oursenplus en passant par Lorant Deutsch, Elie Semoun (toujours impayable), Lionnel Astier ou encore Franck Pitiot, personne ou presque n'est oublié. Un sans-faute total. Qui dit famille Astier dit également humour à la Kaamelott. Ce qui avantage encore le film car le style de la série-culte se marrie à merveille avec la BD Culte. Les digressions guindées des esclaves, les revendications absurdes des soldats romains ou encore quelques répliques bien senties ("C'est pas faux!"), l'esprit Kaamelott habite carrément ce volet d'Astérix et, à défaut de retrouver la clique du roi Arthur sur grand écran, on se consolera avec ce mariage certes inattendu mais pleinement réussi.

    Enfin, on finira par l'habilité des réalisateurs pour filmer leur récit. Dynamique, jamais chiant, Le Domaine des Dieux ne lasse à aucun moment son public. L'animation, même si elle n'atteint pas les sommets de chez Pixar ou Dreamworks, est d'excellente facture. Les français n'ont absolument pas à rougir de leur travail. Que ce soit pour la scène d'ouverture de la chasse aux sangliers ou pour l'assaut contre le village gaulois, le métrage ne faillit jamais. Il prend aussi le temps de poser des personnages attachants et au character-design réussi, tel que Petiminus, le modeste mosaïste romain un poil largué au beau milieu de toutes ces machinations. Astérix, Obélix et ses compagnons sont toujours aussi géniaux et si l'aventure n'arrive pas non plus à surpasser le génial Les Douze Travaux d'Astérix, elle nous tient en haleine de bout en bout.

    Nouvelle réussite pour Alexandre Astier et très bon premier essai pour Louis Clichy.
    En amoureux de la BD, ils nous offrent une adaptation soignée, respectueuse et simplement jouissive. Sans jamais noyer leur film sous un déluge de références, ils nous offrent au final un des tous meilleurs Astérix sur grand écran.


    Note : 8/10

    Meilleure scène : Les revendications des soldats romains


    votre commentaire
  • [Critique] Calvary

    Pour son second film, l'irlandais John Michael McDonagh reste dans sa contrée natale avec Calvary. Après sa comédie L'irlandais, McDonagh s'intéresse au rôle des prêtres dans une époque qui semble totalement étrangère à ce qu'ils représentent. Pour interpréter le rôle principal de cette histoire à mi-chemin entre comédie et drame, le réalisateur retrouve son acteur fétiche, un certain Brendan Gleeson, grand habitué des seconds rôles qu'on a récemment encore aperçu dans Edge of Tomorrow. Pas forcément destiné à une grande popularité vu sa sortie plutôt confidentiel, Calvary recèle quelques atouts pour attirer l'attention.

    Le père James Lavelle continue, tant bien que mal, à prêcher dans son petit village irlandais. Même s'il n'a trouvé Dieu qu'après la mort de sa femme, il n'en reste pas moins un homme conscient du poids de ses responsabilités. Si les habitants du village n'ont plus grand chose à faire des choses spirituelles, c'est lorsqu'un homme entre dans son confessionnal pour lui dire qu'il va le tuer dans une semaine que tout bascule pour James. Entre l'arrivée d'une fille dévastée par la perte de ses parents et l'hostilité de plus en plus manifeste de ses paroissiens, le père James va devoir traverser son propre calvaire.

    Film typiquement britannique, Calvary oppose le drame très noir à l'humour flegmatique et caustique. Très (trop?) lent dans sa mise en place, le long-métrage installe ses différents protagonistes avec soin, en commençant par le père James Lavelle, un prêtre qui semble anachronique dans son éternelle soutane. Intègre, respectueux et éminemment humain, il attire immédiatement la sympathie en face de cette espèce d'assemblée à la Sodome et Gomorrhe qui représente le petit village où il officie. Interprété par Brendan Gleeson, acteur génial bien trop souvent négligé, le personnage trouble par son intemporalité. Car de l'autre côté se trouve une galerie d'individus tous plus improbables les uns que les autres : le trio Jack - Orla - Simon où Orla prend un malin plaisir à tromper son mari Jack avec Simon, le Dr Harte, cynique et athée - interprété par le trop rare Aidan "Littlefinger" Gillen -, Michal Fitzgerald, un riche blasé et provocateur ou encore un vieil écrivain lassé de la vie. McDonagh nous expose pendant près de la moitié du film le décalage hallucinant entre les mœurs des hommes et femmes du village et le sens moral de James. Si bien que l'on se demande pourquoi le prêtre s'entête à soutenir ces "ouailles"... On reprochera immédiatement la longueur bien trop importante de cette multiplicité de saynètes qui font plus accumulation de séquences théâtrales que véritable histoire fluide. Une bonne coupe aurait ici été salutaire malgré la malice des différentes confrontations.

    On s'aperçoit de toute façon dès le départ que Calvary va mettre la modernité face à l’archaïsme. Dès le petit dialogue entre l'enfant de chœur et James, le spectateur comprend que quelque chose cloche. Outre cette menace proférée en ouverture, le long-métrage joue sur un décalage constant entre l’honnêteté et l'intégrité du père James, sorte de prêtre d'un autre temps qui place le bien d'autrui au-dessus de tout, et l'égoïsme des autres habitants. Chacun creuse un portrait des vices et péchés mortels pour la religion catholique qu'ils sont sensés suivre. De la nymphomane au blasphémateur en passant par le cynique et l'homosexuel, rien n'est épargné au père Lavelle au cours de son calvaire personnel qui remet en question le bien-fondé même de son sacerdoce. A côté de ses paroissiens, il y a également sa fille, Fiona, qui représente certainement le seul véritable péché de James, la seule personne qu'il a abandonné après la mort de sa femme pour prendre la soutane. Même si encore une fois la résolution de cet arc traîne en longueur, elle permet de donner une allure encore plus humaine au roc de détermination qu'est James, sans parler du contraste qu'il offre avec son jeune collègue vénal. 

    Enfin, Calvary parle surtout de l'amalgame. L'amalgame entre les prêtres pédophiles et orduriers d'un côté, et tous ces petits religieux très loin de l'institution de l'Eglise et qui croient profondément en ce qu'ils font. Au fond, et de la façon la plus injuste qui soit, James paye pour les coupables et l'innocent qui a subi cette infamie devient à son tour coupable. Jusqu'au bout James doute, de ses paroissiens, de lui, de son but. Mais à la toute fin, il affronte l'existence et regarde en face son accusateur. Dans cette séquence finale en bord de mer, McDonagh arrive à toucher du doigt ce qu'il cherchait depuis le début : la rencontre de la grâce et de l'injustice. Soyons clair, si le métrage entier était à la hauteur de ces vingt dernières minutes, Calvary aurait été un excellent film. Le regard amer et mélancolique posé par l'irlandais sur ses personnages dans ces derniers instants - l'ultime discussion entre Michael et James - montre le potentiel contenu au sein ce petit film sans prétention. Dommage simplement que Calvary mette tant de temps à s'exprimer et à tirer le meilleur de son postulat de départ. On se consolera avec cet humour acéré de la première moitié et le personnage toujours sublime du père Lavelle.

    Pas aussi réussi qu'espéré, Calvary offre cependant un récit honnête, bien filmé et qui se bonifie au fur et à mesure de l'avancée de sa trame. Porté par les épaules solides d'un Brendan Gleeson au mieux de sa forme, le second métrage de John Michael McDonagh aurait certes gagné à être écourté mais ne mérite certainement pas l'indifférence dans laquelle il est sorti.
    Un bon film à voir, d'autant plus si le sujet vous intéresse.


    Note : 7/10

    Meilleure scène ; La confrontation finale sur la plage



    votre commentaire
  • [Critique] Quand vient la nuit

    Doit-on encore s'étonner de la déplorable traduction française des films paraissant dans les salles de cinéma de l'Hexagone ? A voir celle de The Drop, le second film de Michael R. Roskam, il reste tout à fait permis de se demander comment le métrage peut avoir reçu ce titre affligeant de Quand vient la nuit. Certainement pour faire plus conventionnel auprès du spectateur lambda. Mais bon, après tout, le texte de Denis Lehane, qui a inspiré le film sus-cité, était lui aussi tout autre, à savoir Animal Rescue. Que l'on se rassure cependant, cela n'impacte en rien la qualité du nouveau bébé de Roskam, réalisateur belge révélé en 2011 par le formidable Bullhead, qui en profitait également pour mettre un certain Matthias Schoenaerts sur le devant de la scène. Pour l'occasion, le belge passe sous l'égide de la Fox, lui donnant l'opportunité d'engager des acteurs aussi brillants que Tom Hardy, James Gandolfini ou Noomi Rapace. Film noir pur jus, Quand vient la nuit achève de convaincre du talent de Michael Roskam.

    Bob Saginowski tient le bar de son cousin, Marv. Tous deux, ils gèrent également occasionnellement une opération de blanchissement d'argent sale pour le compte de criminels tchétchènes. En fait, certaines nuits, le bar de cousin Marv devient un Drop Bar où transite l'argent de la pègre. Seulement voilà, c'est exactement le genre de choses qui attirent les braquages. Spoliés, ils doivent faire face à la colère de leurs associés. C'est en cherchant un moyen de surmonter cette affaire que Bob tombe, par hasard, sur un chiot abandonné dans une poubelle et qu'il fait la connaissance de Nadia. Maladroit et effacé, le barman va avoir bien du mal à gérer ces nouveaux arrivants dans sa vie déjà bien assez compliquée.

    Film lent, Quand vient la nuit évite toute esbroufe ou grande scène d'action qui parsèment les polars lambda produits ces derniers temps par Hollywood. Roskam aborde au contraire son histoire de façon méticuleuse et plante sa galerie de personnages avec un talent consommé. Le métrage ne cherche pas à cacher qu'au-delà de cet imbroglio de braquages, il mise tout sur ses (anti-)héros et son atmosphère. Pour les premiers, on reconnaît instantanément la patte "Roskam" avec des portraits tout en nuances qui recèlent une grande part d'ombre mais aussi une banalité parfois très comique. On pense aux wallons de Bullhead lorsque Bob et Marv emballent un bras jeté dans un sac devant leur bar. Le réalisateur cherche à rendre crédible ses personnages et pour se faire, il évite tous les clichés, une chose assez rare ces derniers temps. Pas de super-gangster ou de tueurs surdoués dans Quand vient la nuit, mais de simples malfrats qui ont tout voulu mais se sont fait dépasser par la dure réalité. C'est la grande force du métrage, ne jamais chercher à impressionner mais à coller au plus près du réel pour nous imprégner de son univers au final très noir.


    Il faut d'ailleurs bien le dire, ce que fait Roskam avec son film, c'est une sorte de retour aux sources. Quand vient la nuit ne renie jamais son statut de film noir à l'ancienne, lent et implacable, où la froideur des situations contraste avec quelques intrigues bien senties. Le réalisateur belge manie toujours aussi bien sa caméra et ressert une grande partie de son action au cœur d'un bar traditionnel de New-York. Malgré les nombreux autres endroits traversés par le film, le spectateur ressent une impression d'intimité étonnante, d'autant plus étonnante par ce qu'on a tenté de vendre au travers du pitch et de la bande-annonce. Mais Roskam sait y faire pour surprendre son monde et ne pas s'aligner sur les canons Hollywoodiens. Evidemment, on peut ajouter que la qualité du film doit beaucoup au scénario de Lehane (le même qui nous a offert Mystic River ou Gone Baby Gone, deux autres poids lourds du genre)... et dans un sens c'est totalement vrai tant le suspense et la maestria dans le renversement des intrigues apparaissent comme les deux plus gros atouts du métrage. Il ne faut pourtant pas oublier l'excellente mise en scène de Roskam ni sa façon de magnifier ses personnages.

    Ceux-ci sont aussi délicieux qu'inattendus et réservent, chacun à leur façon, leur lot de surprises. Si Matthias Schoenarts est ici bien plus discret que dans Bullhead, Quand vient la nuit déroule le tapis rouge à un acteur extraordinaire (ceux qui ont vu Bronson le comprendront d'autant plus) : Tom Hardy. Loin des muscles de Bane, l'anglais délaisse son accent british pour jouer un brave type discret auquel on s'attache et l'on s'identifie immédiatement. Encore une fois, il s'avère bluffant, aussi à l'aise dans la violence que dans un registre un tantinet plus comique et empoté. On n'oublie pas non plus la superbe et talentueuse Noomi Rapace et surtout, le dernier rôle d'un acteur hors norme : James Gandolfini. Même s'il ne décroche pas le rôle principal, l'américain reste tout à fait épatant dans son costume de vieux gangster frustré. Impossible parfois de ne pas penser qu'il s'agit là d'un Tony Soprano raté. Les fans de la série HBO apprécieront. La somme des talents de ce casting quatre étoiles achève définitivement de convaincre même les plus réticents au genre.

    Quand vient la nuit déjoue à peu près tous les écueils du polar à l'Hollywoodienne et condense le meilleur du film noir à l'ancienne. Casting impeccable, mise en scène délicieuse et atmosphère réussie, le second film de Michael Roskam  confirme tout le bien que l'on pensait déjà du réalisateur belge. En y rajoutant le talent d'un certain Denis Lehane, vous obtenez un sacré bon moment de cinéma.

    Note : 9/10

    Meilleure scène : La dernière tentative de braquage



    votre commentaire
  • [Critique] Marie Heurtin


    Après des films tels que l'Homme qui rit ou Les émotifs anonymes, Jean-Pierre Améris s'attaque à une histoire vraie de l'Ecole française des sourdes-muettes-aveugles de Larnay autour de la jeune Marie Heurtin. Sourde et aveugle, la jeune fille est recueillie par sœur Marguerite à la fin du XIXème siècle. Considérée comme une cause perdue, et cela même par ses parents, Marie retrouve pourtant peu à peu l'humanité qui lui faisait défaut auprès de sœur Marguerite. Pour celle-ci, Marie représente une occasion unique de tester sa détermination et sa volonté. C'est ainsi que débute une histoire peu banale qui révolutionnera la prise en charge des sourds et aveugles en France.

    Marie Heurtin n'est pas un film qui avait vocation à drainer les foules. Dépourvu de stars bankables (exceptée peut-être Isabelle Carré, et encore), tourné dans l'austérité d'un couvent, on ne peut pas dire que le métrage part avec les meilleurs atouts pour séduire les foules. Certainement conscient de cela, Jean-Pierre Améris s'efface totalement derrière ses personnages et son histoire tout en tentant, avec une grande sincérité, de restituer la grandeur d'âme de Marie et sœur Marguerite. Très loin des films d'esbroufe aux mécanismes dramatiques vus et revus, Marie Heurtin fonctionne uniquement sur son duo et, forcément, sur l'enjeu de l'humanisation de la petite Marie. On salue d'ailleurs immédiatement le talent insolent d'Ariana Rivoire, une actrice sourde qui livre une performance simplement parfaite de bout en bout, d'une poignante émotion que ce soit dans sa rage animale ou dans sa fragilité humaine. Elle est définitivement LA révélation du film.

    Mais revenons à nos moutons. Marie Heurtin centre son propos autour de l'humanisation. Jean-Pierre Améris pose une question fondamentale : comment un homme devient-il homme? D'abord totalement animal puisque coupé de tout, Marie évolue petit à petit et s'humanise avec grâce et douceur devant la caméra d'Améris. Un propos similaire à The Tribe, le film choc venu de l'Est, mais qui s'avère immensément plus pertinent et subtil ici. Tour à tour, la fillette incarne les deux facettes de son lourd handicap et c'est le courage d'une âme hors du commun qui permettra de renverser la pièce. L'évolution de Marie au cours du long-métrage illustre à merveille l'importance primordiale d'une des choses qui définit le plus profondément l'humanité d'une personne : la communication. Sans elle, pas d'interaction, pas d'échange...pas d'émotion. Plus le métrage avance, plus Marie apprend à communiquer et plus elle fait naître des émotions fortes dans le cœur des spectateurs.

    Grâce à son silence, le long-métrage passe aussi et surtout ses émotions par le toucher. Mais pas que. Elle passe aussi par l'odeur qui guide Marie privée de ses autres sens, pour sentir un vieux couteau familier ou un père affectueux. Les quelques séquences autour de cette surcompensation des autres sens font mouche, Améris trouve l'équilibre pour ne pas tomber dans le ridicule et magnifier son propos. Si tout cela est possible, c'est justement parce que le réalisateur français fait preuve d'humilité et que son film ne cherche jamais à impressionner ou à jouer les tire-larmes. Il montre et explore deux personnalités et le lien unique qui se tisse entre elles deux. L'alchimie entre Marie et Marguerite est aussi immédiate que parfaite, d'une intensité si poignante qu'elle se passe d'artifices. C'est là le second pilier du métrage et de ce qui façonne un être humain : la capacité à aimer. Grâce à la magnifique et intense partition d'Isabelle Carré, Améris touche bien plus juste encore qu'on aurait pu le soupçonner de prime abord. Jusqu'à cette séquence aérienne et splendide qui affirme une autre communication impossible comme ultime preuve d'humanité : le souvenir. 

    On peut certes reprocher à Marie Heurtin de ne pas être convainquant parfois sur les costumes (la rencontre avec la mère semble anachronique) ou sur la maladie de sœur Marguerite, mais ce que le métrage évite parait bien plus important. Alors qu'il se déroule dans un institut transformé en véritable couvent par les bonnes sœurs, le film ne parle quasiment pas de religion. Lorsque Soeur Marguerite a une "révélation", c'est par sa rencontre avec l'humanité prisonnière de Marie. Lorsque Marguerite invoque Dieu pour parler de la mortalité, c'est avec un scepticisme naïf et bienveillant que l’accueille Marie. Et surtout, lorsque Marie parle à Marguerite dans ce final aussi discret que virtuose, c'est avant toute chose à la femme qu'elle aime comme une mère qu'elle parle. Rien que pour ça, le film est remarquable.

    Authentique surprise, Marie Heurtin offre non seulement un rôle magnifique à deux actrices formidables, mais également une réflexion, un témoignage unique sur ce qui fonde l'humanité. Magnanime jusqu'au bout, drapé dans sa sobriété et dans son respect, Marie Heurtin touche bien plus sûrement le spectateur que n'importe quel film français sorti cette année.
    Donnez lui donc le succès qu'il mérite !

    Note : 9/10

    Meilleure scène : La scène finale

    Meilleure réplique : "Couteau"


    votre commentaire



    Suivre le flux RSS des articles
    Suivre le flux RSS des commentaires