• [Critique] Everest

    [Critique] Everest

    On ne peut pas dire que l'Islandais Baltasar Kormakur ait brillé dans le monde du cinéma jusqu'ici. Après des films aussi mineurs que 2 Guns ou Contrebande, il a tout de même réussi à décrocher le poste de réalisateur sur un blockbuster américain avec Everest. Récit inspiré de faits réels (comme en raffole Hollywood), le long-métrage se base sur l'ouvrage Tragédie à L'Everest du journaliste et alpiniste Jon Krokauer qui raconte la destin funeste d'une expédition vers le plus haut sommet du monde ayant coûté la vie à quinze personnes. Pour l'occasion, Kormakur s'entoure d'un casting hallucinant avec pas loin d'une dizaine d'acteurs connus parmi lesquels Jason Clarke, Josh Brolin ou Jake Gyllenhaal. Si l'on sait pourtant pertinemment que les films catastrophes à l'Hollywoodienne ont tendance à être de vrais nanars en puissance, Everest fait un choix très pertinent : raconter un drame sans tout baser sur le côté spectaculaire de la chose. Du coup, le résultat s'avère bien moins catastrophique que prévu.

    Everest revient donc sur un fait divers datant du 10 mai 1996. A cette date, plusieurs expéditions commerciales menées par des alpinistes chevronnés tentent d'atteindre le sommet de l'Everest. Parmi elle, celle d'Adventure Consultant dirigée par Rob Hall et comprenant le journaliste Jon Krakauer du magazine Outside, Beck Weathers, Doug Hansen ou encore Yasuko Namba, la seconde japonaise a avoir atteint les sept plus hauts sommets du monde. Alors que le camp de base grouille de monde avec l'afflux des touristes et aventuriers de tous poils, l'équipe de Rob Hall s'unit à celle de Scott Fischer pour l'ascension finale au jour J. Du fait d'une météo catastrophique et d'un retard sur l'horaire prévu, l'expédition tourne au drame, laissant derrière elle une quinzaine de victimes gelées dans les neiges du toit du monde. 

    Si la bande-annonce laisse entrevoir un film purement catastrophe, Everest fait le choix autrement plus pertinent d'être le récit d'une catastrophe. Baltasar Kormakur nous raconte comment la fameuse expédition du 10 mai 96 a pu se transformer en désastre en tentant d'humaniser le plus possible ses protagonistes. Certes, Everest n'est pas un film d'acteurs, mais l'Islandais donne l'épaisseur nécessaire aux protagonistes de son histoire pour que le spectateur éprouve une certaine empathie envers eux, notamment à l'égard de Rob Hall, Doug Hansen et Yasuko Namba. On pointera immédiatement du doigt de grosses ficelles à l'Hollywoodienne tels que les rôles de Robin Wright et Keira Knightley en femmes éplorées qui, en fin de compte, n'ont rigoureusement aucune utilité à part rajouter une bonne couche de larmes. Prendre de telles actrices pour ce genre de rôle frise la blague de mauvais goût.

    Heureusement, Everest s'intéresse avant tout au déroulement de l'expédition. En posant sa caméra dans l'Himalaya, Kormakur nous fait rêver, dans ce monde totalement hors du temps, extrêmement impressionnant sur grand écran. Si l'on a bien quelques petits frissons lors d'une chute de neige ou le tremblement d'une échelle, le film ne mise pas sur un côté catastrophe qui l'aurait condamné. Il préfère se concentrer sur le destin fatal de ses protagonistes pris au piège de rafales impitoyables, tentant avec plus ou moins de bonheur d'entretenir le suspense jusqu'au bout quant à leur sort. La réalisation soignée et étonnamment ample de l'Islandais capture à la fois le désespoir du lieu et le côté exceptionnel de cette ascension. Si bien que l'on est souvent soufflé par la beauté des images et l'immensité des reliefs (encore magnifié par l'emploi de la 3D, relativement réussie). De ce côté, le métrage ne ment à aucun moment et en donne pour son argent au spectateur avide de grands espaces.

    Côté acteurs, même si l'on est impressionné par le casting 5 étoiles, il faut bien avouer qu'il n'y a guère que Jason Clarke pour véritablement tirer son épingle du jeu. Les autres n'ont ni le temps nécessaire à l'écran ni la profondeur psychologique requise pour faire vivre leur personnage, à commencer par un Jake Gyllenhaal en mode touriste ou un Josh Brolin bourru et effacé. On ne parlera même pas du revenant Sam Worthington qui n'a quasi aucune utilité. Le vrai acteur principal du film, c'est bien l'Everest et personne d'autre. Pour enjoliver tout de même son histoire, Baltasar Kormakur glisse un petit sous-texte mordant à l'encontre du tourisme de l'Everest, pointant du doigt la logique commerciale de l'entreprise et les drames que cet angle d'attaque apporte inévitablement. Ce petit plus permet dans un sens d'apporter un léger avantage par rapport à la conccurrence en la matière (même si elle est bien faible).

    Réalisé avec soin, souvent haletant et véritablement impressionnant, Everest fait les bons choix et rempli son contrat de blockbuster frigorifiant. Sans jamais aller chercher bien loin, Baltasar Jormakur livre un film soigné et honnête, à peine entaché par des rôles féminins parfaitement inutiles et un côté tire-larmes agaçant sur sa fin.
    Les amateurs du genre seront ravis !

    Note : 6.5/10

    Meilleure scène : L'arrivée de la tempête au sommet
      

     

     

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  • Commentaires

    1
    vegapunk
    Samedi 3 Octobre 2015 à 11:52

    Une belle chronique avec laquelle je suis assez d'accord. Je ne connais pas d'autres films sur l'alpinisme (à part...Cliffhanger !), mais l'approche réaliste de l'ascension de L'Everest, avec le prix d'entré, les choix de vie des grimpeurs liés à cette passion chère et dangereuse, le business établi sur place, l'amateurisme raillé m'ont plu. J'ajouterai pour ma part que si le film choisit de ne pas nous imposer une longue présentation de ses protagonistes, ce qui évite l'impatience parfois interminable que génère ce genre de scénario, on peut se retrouver légèrement perdu quand la tempête est là et que nos acteurs barbus appellent d'autres barbus pour demander de l'aide, par exemple. Les initiés doivent avoir en tête les relations entre chaque équipe et grimpeurs, leurs parcours personnels et la géographie précise des pics et des bases: de mon côté, c'était assez flottant sans que ce soit handicapant. Le film a l'intelligence de montrer que l'arrivée au sommet n'est pas un moment des plus transcendant tant il faut veiller à descendre sain et sauf, ou encore que des grimpeurs et sherpas doivent se sacrifier, amener du matériel ou s'arrêter à mi-parcours pour que d'autres puissent tenter le sommet, et obtenir la gloire. Je recommande le manga "Le sommet des dieux" de Taniguchi, une belle réussite qui se montrait également réaliste sur les à côté de l'ascension du K2.

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