• [Critique] Fatima

    [Critique] Fatima
    César du meilleur film 2016
    César du meilleur espoir féminin 2016 pour Zita Hanrot
    César de la meilleur adaptation 2016
    Prix Louis Delluc 2015

    S'il y a bien eu un événement dans la morne cérémonie des césars de cette année 2016, c'est bien la vague d'amour pour le film de Philippe Faucon. Sobrement intitulé Fatima, ce drame intimiste adapté de Prière à la lune de Fatima Elayoubi nous parle d'une femme attachante en la personne de Fatima, une mère courage qui se débat avec sa condition sociale difficile pour tenter de donner le meilleur avenir possible à ses deux filles. La première, Souad, a 15 ans et vit la période de révolte que traverse la grande majorité des adolescents alors que sa sœur de 18 ans, Nesrine, entre en première année de médecine. Sauf que pour payer ces études extrêmement coûteuses et exigeantes, Fatima va devoir accumuler les petits boulots et notamment les ménages ici et là, au grand dam de Souad que même son père a du mal à calmer. Ce petit film au pitch minimaliste a non seulement été nommé à la cérémonie des césars mais, en plus, a été couronné du titre de meilleur film 2016 à la surprise générale. Un peu passé inaperçu lors de sa sortie sur grand écran, il était normal de se pencher sur ce long-métrage d'un réalisateur français discret mais aguerri.

    De très courte durée (une heure vingt minutes à peine), Fatima retrace le combat d'une mère divorcée pour donner la meilleure vie possible à ses deux filles. Dans cette optique, Philippe Faucon dessine un portrait tendre, sincère et poignant, d'autant plus poignant que la plupart du temps le personnage de Fatima reste humble et proche de ses filles envers et contre tout. Soria Zeroual, dont c'est ici le premier rôle, arrive à endosser avec succès le poids moral d'une Fatima tiraillée entre ses valeurs morales et son envie de briser son carcan social à travers le destin de sa fille Nesrine. Même si elle ne brille pas comme les césars voudraient nous le faire croire par sa nomination dans la catégorie meilleure actrice, le talent de Zeroual est pour beaucoup dans l'empathie que ressent le spectateur pour cette histoire familiale difficile. Car avant tout, Fatima est l'histoire d'une cellule familiale et de la difficulté de gérer deux enfants lorsque l'on est seule, quand on a pas l'autorité paternelle pour soi et que l'on passe pour une femme médiocre aux yeux de ses propres enfants. C'est ici que les problème se profilent pour le long-métrage de Faucon.

    On apprécie grandement sa peinture familiale ainsi que la complicité qu'il tente d'établir entre la mère et les deux filles mais on comprend rapidement que le fait que Fatima soit d'origine algérienne va jouer un grand rôle et politiser le film. Du coup, le récit dévie vers quelque chose de plus audacieux et qui se loupe à moitié. Si l'on est agréablement surpris par la charge violente de Philippe Faucon à l'encontre d'un certain climat qui règne dans les cités et qui empêche les jeunes filles d'origine maghrébine de vivre leur vie comme elles l'entendent, on est bien plus circonspect devant les autres sujets sociaux qu'il aborde. De façon malheureuse, le réalisateur français se risque à la critique socio-politique et tombe dans la caricature à plusieurs reprises. Ainsi, Fatima va travailler pour une famille de blancs forcément très riches, forcément très cons et forcément détestables. De même, après un malheureux accident, Fatima souffre de son épaule alors que tous les examens médicaux sont normaux. Il faudra l'intervention d'une médecin pas comme les autres (en fait d'origine maghrébine) pour vraiment la comprendre, les autres devant être de pauvres imbéciles. Cette tendance à la caricature grossière laisse perplexe, d'autant que le film a bien d'autres qualités.

    Le parcours de Nesrine, par exemple, est brillamment mis en valeur et illustre à la fois l'envie de modernité de ces jeunes filles de banlieue mais aussi les sacrifices consentis par la famille pour lui ouvrir les portes du succès. La jeune Zita Hanrot assure d'ailleurs très bien son rôle et apparaît comme bien supérieure aux autres acteurs du films, notamment Kenza Noah Aïche, juste imbuvable et (sur)jouant atrocement son rôle d'ado en révolte. Il faut dire qu'elle n'est pas non plus aidée par un arc scénaristique largement délaissé au final et qui aurait pu être fortement intéressant s'il avait été développé avec plus de soin. Le problème du film de Philippe Faucon, c'est qu'il cherche à ratisser large mais qu'il manque de profondeur et de réflexion sur un temps aussi congru et avec un casting finalement bien fragile. Fatima est l'exemple même du petit film qui veut trop en faire et qui finit par ne pas mener à bien ce qu'il lance. Sa récompense aux Césars confirme une nouvelle fois que la cérémonie est devenue purement politique et ne s'intéresse plus guère aux qualités cinématographiques des long-métrages. Une pratique tout à fait détestable. 

    En faisant abstraction de sa récompense imméritée attribuée par un jury imbécile, Fatima s'affirme comme un film agréable et touchant qui sait finalement rendre honneur au courage d'une mère et qui sait tirer des relations mère-filles le meilleur. On regrette juste que Philippe Faucon parte dans tous les sens et perde un peu trop vite de vue le principal point fort de son métrage pour verser dans la caricature grossière.

    Note : 6.5/10

    Meilleure scène : Fatima qui cherche le nom de sa fille sur le tableau des résultats.

     

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