• [Critique] Kumbh Mela, Sur les rives du fleuve sacré


    L’indien Pan Nalin nous propose cette année un nouveau documentaire après Ayurveda. Cette fois, il nous emmène sur les rives du Gange, à sa confluence avec 2 autres fleuves sacrés. Tous les 12 ans, le plus grand pèlerinage du monde s’y déroule avec près de 100 millions d’Indiens qui viennent s’immerger dans les eaux du fleuve divin. Nalin choisit de prendre sa caméra pour y participer et rapporter les images à son père. Il ne se contente pourtant pas de filmer les festivités mais va également suivre quelques destins hors du commun dans ce rassemblement extraordinaire et unique au monde où fidèles, gens du peuple, sâdhus et yogis se croisent. Kumbh Mela, Sur les rives du fleuve sacré est une invitation au voyage en même temps qu’une extraordinaire peinture humaine.

    Pour nous immerger dans ce pèlerinage au bord du Gange, Pan Nalin laisse vagabonder sa caméra d’un bout à l’autre de la manifestation. Ses images, formidables, capturent la grandeur et la démesure incroyable de Evènement, et s’arrêtent sur des visages, des hommes noyés dans la multitude. Chaque regard trouve un écho dans le cœur du spectateur et au-delà de ce fourmillement de vies et de destins, Nalin nous dévoile une humanité foisonnante. On s’étonne devant les défilés de sâdhus, ces sortes d’ermites vénérés comme des saints par les Indiens, ou devant cette dévotion quasi-unique au monde. Plus encore, ce sont les images nocturnes où le flamboiement des campements et des défilés dessine une constellation incongrue, spectacle fugace d’une humanité qui brûle de mille feux dans la foi. Celle-ci rejaillit sur tout mais s’avère d’une grande bonté et d’une grande tendresse, Kumbh Mela montre le meilleur de l’homme. Et parfois le pire. Nalin ne se fixe pas de limite claire, il se contente de nous faire partager son ébahissement que l’on devine intense.

    Les images qu’il nous rapporte, Nalin prend bien soin de les monter et de leur donner un sens. Un sâdhu qui semble courir sur l’eau, des hommes et femmes disparus réduit à l’état de bouts de papier dans un panier... Tout trouve un sens, sans forcément décrire, sans presque jamais intervenir. Des mots, il y en a pourtant dans Kumbh Mela. Le réalisateur indien donne voix à plusieurs destins : celui de parents dont l’enfant s’est perdu dans la masse confuse qui gravite autour du fleuve et qui tentent désespérément de le retrouver, celui d’un jeune gosse fugueur qui rêve de devenir soit un parrain soit un sâdhu, ou encore celui de Yogi Baba et de Bajrangi, l’enfant perdu. Ces trois fils s’entrelacent et se croisent, Nalin les laisse s’exprimer, les laisse, mine de rien, inclure leurs petites histoires dans la grande.

    Chacun des protagonistes que l’on rencontre apporte sa pierre à l’édifice bâti patiemment par Nalin si bien qu’à la fin, l’ensemble des mots et des voix qui s’élèvent forme un hymne à la vie et à l’humanité vibrant d’authenticité. C’est cela qui touche le plus dans Kumbh Mela, ce sentiment de s’introduire dans un autre monde et dans d’autres existences, fascinantes et intrigantes. C’est le discours touchant de Baba Yogi qui a découvert l’amour paternel en recueillant un fils qui n’est pas le sien. Ou les bravades du jeune fugueur envers les policiers entourant les campements. Ou cet ardent courage de parents affolés. Le Gange en arrière-fond, le réalisateur indien nous inonde mais pas avec l’eau sacrée, mais bien la vie sacrée, celle des habitants, extraordinaires ou ordinaires, qui traversent son documentaire. Le résultat est beau à en tomber, touchant et d’une force hors du commun.

    Document exceptionnel sur un événement qui ne l’est pas moins, Kumbh Mela, Sur les rives du fleuve sacré flirte avec la foi, l’humain et le divin. Il démontre qu’avec du talent, de la sincérité et surtout des idées, on peut faire bien plus marquant que n’importe quel blockbuster. Pan Nalin parle avec amour d’une Inde qui vous fascinera à coup sûr, et vous emmène à la rencontre d’hommes et de femmes que vous n’êtes pas près d’oublier.

    Note : 9/10

    Meilleures scènes : Toutes les séquences de Baba Yogi avec Bajrangi.

    Meilleure réplique : Tous ces drames pour une bouteille d'eau


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