• [Critique] 10 Cloverfield Lane

    [Critique] 10 Cloverfield Lane

     A l'heure actuelle, tenir un projet de film secret tient de la gageure. C'est pourtant ce qui est arrivé avec 10 Cloverfield Lane dévoilé seulement 1 mois avant sa sortie en salles. Huit ans après Cloverfield, le film de monstre en plein cœur de New-York qui avait révélé Matt Reeves (depuis parti explorer la Planète des Singes), le même Matt Reeves s'associe au célèbre J.J Abrams pour financer le premier long-métrage d'un illustre inconnu : Dan Trachtenberg. A l'exception d'un sympathique court-métrage sur le jeu Portal, cet américain de 34 ans issu du monde de la pub n'avait juste là guère eu l'occasion de briller. 10 Cloverfield Lane lui donne aujourd'hui cette chance.

    Prenez trois personnages, un abri en sous-sol et saupoudrez le tout d'une atmosphère paranoïaque et vous obtenez 10 Cloverfield Lane. Petit film au budget assez modeste, le long-métrage de Dan Trachtenberg constitue pourtant une petite surprise en soi. Il a d'abord la bonne idée de proposer quelque chose de radicalement différent de son supposé prédécesseur. Les liens avec Cloverfield s'avèrent en effet ténus, voir inexistants pendant la quasi-totalité du film. Ceux qui n'ont donc pas vu le film de Matt Reeves peuvent tenter l'expérience les yeux fermés. Il semble en effet que l'étiquette Cloverfield ait une intention publicitaire en tentant de raccrocher les wagons à une oeuvre connue du grand public. Une astuce qui permet à Trachtenberg de livrer son propre film sans se soucier pour une bonne part des contraintes inhérentes à une suite.

    Mais revenons à nos moutons. Dans 10 Cloverfield Lane, la belle Michelle se retrouve enfermée dans un abri souterrain après un accident de la route. Son sauveur-geôlier, Howard, affirme que le monde extérieur n'existe plus. Quelque chose est arrivé et il l'a recueilli, elle et un autre homme du nom d'Emmett, dans l'abri qu'il prépare soigneusement depuis des années maintenant. Intrigue minimaliste mais pleine d'opportunités, l'histoire de 10 Cloverfield va reposer sur les épaules d'un casting restreint. C'est là la première bonne surprise du film qui porte son dévolu sur l'excellente Mary Elizabeth Winstead et, surtout, sur un acteur formidable et inquiétant comme pas possible : John Goodman. S'il faut désigner un vainqueur parmi ce trio de comédiens, c'est certainement lui qui remporte la palme. Comme à l'accoutumée, il impressionne de bout en bout dans un rôle ambiguë et souvent terrifiant. Trachtenberg s'affirme déjà comme un excellent directeur d'acteurs. Seulement 10 Cloverfield Lane doit aussi trouver d'autres atouts.

    Parmi eux, le cadre du récit. Grâce à l'unicité de lieu de 10 Cloverfield Lane, le spectateur suit avec un sentiment claustrophobe de plus en plus intense les rebondissements de l'histoire. A la fois pour économiser sur un budget que l'on devine limité mais également pour donner une saveur particulière à son récit, Trachtenberg épouse le huit-clos entièrement, utilisant les possibilités offertes par le genre au mieux des possibilités. Le résultat s'avère réussi notamment grâce à cette constante question sur la réalité d'une apocalypse. Pour un peu, on pourrait voir dans ce 10 Cloverfield Lane un rejeton Hollywoodien de Take Shelter de Jeff Nichols avec John Goodman à la place de Michael Shannon. Mais la comparaison s'arrête là puisque la tension du film repose surtout sur la nature de ce qui se trouve au dehors. Trachtenberg prend un malin plaisir à nous faire douter et mène brillamment sa barque avec peu de choses au final. Tout tient dans le métrage grâce au doute insidieux entretenu par quelques séquences chocs (la femme à la porte de l'abri, le Help Me sur le hublot...). Une petite réussite qui finit par perdre en intensité avec la révélation finale.

    On n'en dira bien sûr pas plus sur la nature de ce qui attend Michelle en dehors de l'abri mais c'est ici que l'on peut retrouver une mince justification dans la filiation avec Cloverfield. Sauf que cette façon finalement bien artificielle de lier les deux peine un tantinet à convaincre. Pas que la fin soit mauvaise en soi mais plutôt qu'elle semble forcée. On se demande en réalité comment Dan Trachtenberg aurait terminé son film en ayant les mains totalement libres. En l'état, 10 Cloverfield Lane est une amusante expérience dans le sens où Abrams et Reeves sponsorisent un petit nouveau franchement plein de promesses en lui cédant la place sur un univers qu'ils ont eu même construit jadis. Si l'on aurait préféré qu'ils financent un projet totalement nouveau, le résultat obtenu n'a vraiment rien de honteux et ouvre même certaines perspectives pour la suite de la carrière du réalisateur. Cette fausse-suite a en effet des allures de véritable chance pour Dan Trachtenberg.

    Huit-Clos anxiogène et génialement hanté par l'imposante carrure d'un John Goodman impressionnant, 10 Cloverfield Lane surprend de façon agréable le public. Ce n'est certainement pas le thriller du siècle mais une série B efficace, bien réalisée et qui tient en haleine sur plus d'une heure quarante. Par les temps qui courent et la tendance agaçante à la surenchère pyrotechnique, voici un intermède bienvenu.
    Avis aux amateurs.

     

    Note : 7.5/10

    Meilleure scène : La rébellion de Michelle à table

     

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