• [Critique] Southern Bastards, Tome 1 : Ici repose un Homme

    [Critique] Southern Bastards, Tome 1 : Ici repose un homme

    Difficile dans le monde du comics américain de passer à côté du petit génie Jason Aaron. Responsable de l'incontournable série Scalped (éditée également intégralement chez Urban Comics) dans la prestigieuse collection Vertigo ou de poids lourds chez Marvel comme son  fameux run sur Wolverine, l'américain quitte cette fois les deux grandes maisons mères du comic book US pour aller faire un tour chez Image. Rejoint par Jason Latour côté dessin, il nous offre la série Southern Bastards, un récit brut de décoffrage prenant place dans l'Alabama. Edité pour la première fois en France par Urban, le premier volume (intitulé Ici repose un Homme) ne fait pas dans la demi-mesure.

    Earl Tubb est de retour dans le village de Craw County dans le fin fond de l'Alabama. Il se donne deux jours pour déménager les affaires de l'ancienne maison de son père et foutre le camp de cette satané ville. Seulement voilà, les vieux démons ne sont jamais loin, surtout lorsque ce sont les pires ordures du coin qui ont repris les choses en main dans la région. Une seule confrontation qui tourne mal dans le restau' local et c'est l'escalade. Et Earl n'est plus le genre d'homme à fuir. Mené par la poigne de fer du belliqueux Euless Boss, le coach de l'équipe de football locale, les rats montrent les dents. Réveillant de vieilles haines et de profonds traumatismes, Earl Tubb n'a plus qu'une solution : reprendre le gourdin de son vieux.

    Génie du récit hard-boiled, Aaron retrouve sa plume acérée pour ces quatre premiers numéros de la série Southern Bastards. Après une courte préface des deux auteurs qui nous expriment à la fois leur haine et leur amour du sud des Etats-Unis, les choses vont vite, très vite. Pourtant, Aaron ne précipite rien, il laisse éclater la violence et resurgir avec fracas des éléments du passé de ses personnages. Au cours de ce récit, on suit Earl Tubb, un vieux briscard ayant fait le Viêt nam et qui cache une sacrée rancune envers son paternel, l'ancien shérif de Craw County. Incarnation magnifique mais impitoyable de la justice, Earl n'y va pas avec le dos de la cuillère. Et c'est tant mieux quand l'on voit la cruauté et la bêtise des rednecks d'en face.

    Parce que oui, Southern Bastards nous emmène faire la (dé)plaisante connaissance de ces hommes bas du front et violents qui peuplent l'Amérique profonde. Dépeint sans aucune concession et avec un constant souci de réalisme social par Jason Aaron, Boss et ses hommes sont un ramassis d'ordures qui n'éprouvent aucun remord lorsqu'il s'agit de tabasser à mort un homme, voir pire. L'affrontement entre Earl et les sbires fait peut-être long-feu mais Jason Aaron garde le suspense intact pour l'inévitable rencontre entre Tubb et le Coach, point d'orgue de ce récit brutal. Cependant, il ne faut pas limité Southern Bastards à un comic book d'action, il est en effet bien davantage. Outre le réalisme de l'environnement et des protagonistes, Jason Aaron travaille le passé d'Earl et, grâce au talent de Latour, fusionne passé et présent, expliquant comment les vieilles rancunes se pérennisent.

    Entre les lignes, Southern Bastards devient un récit mélancolique. Bouffé par l'amertume d'une vie douloureuse, Earl Tubb expie ses démons lorsqu'il prend la défense des faibles. Il rejoue à sa façon la partition paternelle et retrouve en un sens, la rédemption qu'il avait attendu toute sa vie. L'emploi de la tombe et de l'arbre ainsi que des pages explosées en myriades de vignettes, tout cela permet au récit d'inclure une dimension temporelle et un message plus profond. Les racines ne sont jamais vraiment coupées et notre passé nous attend au moindre faux pas. En décidant de l'affronter, Tubb risque gros. Futé comme il est, Aaron nous réserve pourtant un autre niveau de filiation...que l'on vous laisse découvrir dans l'épilogue de ce volume. 

    Récit brutal mais plus malin qu'il n'en a l'air, ce premier volume de Southern Bastards happe le lecteur avec une rapidité peu commune. Jason Aaron profite du trait noir et torturé de Jason Latour pour accoucher d'un uppercut qui fait mal, plongeant sans complaisance dans une certaine Amérique. 
    On se jettera sans attendre sur le second volume.

    Note : 8.5/10

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