• [Critique] Preacher, Tome 2

    [Critique] Preacher, Tome 2

    Pour ce second tome toujours aussi volumineux, nous retrouvons le trio de Preacher - Jesse Custer, Cassidy et Tulip O'Hare - après les événements de l'arc All in the Family. Garth Ennis en ayant terminé pour le moment avec les origines de Jesse Custer et de sa diabolique famille, le scénariste peut s'employer à dévoiler une des grandes menaces autour de Custer : le Graal. Dans le premier arc de ce second tome, Hunters, Jesse et Tulip rejoignent Cassidy en Californie. Occupés à boire, baiser et casser des tronches, nos joyeux comparses ne se doutent pas un instant qu'Herr Starr, le bras droit de l'archipère d'Aronique, s'apprête à tout bouleverser. ce dernier fait parti d'une organisation secrète qui commande aux plus puissants de la planète : le Graal. Voyant en Jesse un nouveau Sauveur potentiel, Herr Starr va remuer ciel et terre pour le capturer. Autant dire que la folie maintenant bien connue de la série s'avère au rendez-vous.

    Ennis ne change pas une recette qui marche en tissant avec toujours plus de fantaisie et d'impertinence les liens qui unissent le trio principal. Seulement, là où Tulip et Jesse constituaient le point de mire du précédent volume, c'est Cassidy qui va trouver cette fois une place bien plus importante en devenant, bien malgré lui, l'enjeu principal des deux arcs présentés ici. Avant de parler du vampire irlandais, disons quelque mots de la nouvelle création d'Ennis et Dillon : Le Graal. Toujours dans l'optique de parodier l'Eglise, les auteurs imaginent une secte de l'ombre qui ressemble fichtrement à une bonne grosse parodie dégénérée du Vatican et du Saint-Père. Puisqu'il s'agit de Garth Ennis, autant dire qu'il n'y va pas avec le dos de la cuillère. L'organisation est dirigée par un gros porc boulimique ne rêvant que de placer un nouveau messie protégé par le Graal à la tête de l'humanité. Sauf que le messie en question est issu d'une longue tradition de consanguins attardés et qu'il est...légèrement débile. Avec son humour corrosif coutumier, Ennis place un allemand qu'on penserait échappé d'un vieux James Bond autant que d'un quartier général SS en tant que bras droit de l'archipère. Une façon assez drôle de rappeler les accointances de l'Eglise et de l'Allemagne à une certaine période de l'Histoire. Pour parfaire le tout, il s'amuse avec la sexualité du viril Herr Starr en ajoutant deux guignols dans l'histoire : les détectives du sexe. Bref, vous l'avez compris, Preacher ne s'arrange pas côté politiquement correct.

    En conservant son sens du dialogue qui claque et de l'insulte qui fait du bien, Ennis s'amuse donc à faire s'affronter le Graal et le trio de choc de Preacher. Et puisqu'on est à San Francisco, terre de débauche par excellence, autant y aller à fond dans les clichés. On fait donc la connaissance d'un certain Jesus de Sade (parfait oxymore quand même) qui organise une soirée pour le moins haute en couleurs durant laquelle tout ce beau monde se rencontre. Les nombreuses saloperies des invités s'avèrent tour à tour drôles, odieuses, insupportables et hilarantes. D'autant plus hilarantes quand Jesse et les autres décident d'y jouer les trouble-fêtes. Forcément, ça tire dans tous les sens, ça gicle, ça meurt bruyamment et de façon improbable...mais c'est surtout jouissif...comme d'habitude. Tout finit par une erreur d'appréciation d'Herr Starr qui présente par la même occasion Massada, la base opérationnelle du Graal, au lecteur. 

    L'arc suivant, bien plus conséquent, s'intitule Proud Americans. Garth Ennis plonge sans retenue dans l'organisation du Graal, présente les personnages débiles et savoureux du Messie et de Frankie, ainsi que les machinations d'Herr Starr pour prendre le pouvoir des mains de d'Aronique. Le numéro #18 offre cependant une parenthèse dans cette aventure et replonge un tantinet dans le passé de Jesse en expliquant l'histoire du briquet Fuck Communism du père du prêcheur. En parlant de la guerre du Vietnam, Garth Ennis fait des merveilles, arrive à faire passer un message plein de tristesse et de rancœur au milieu des excès habituels pour finir par une note sérieuse au sujet des soldats jetés dans l'enfer du Vietnam. C'est foutrement beau. S'ensuit alors 5 numéros d'aventures menées tambour battant où l'enjeu principal est Cassidy, préparant le terrain pour les deux derniers numéros. Ici, Ennis s'emploie à remettre Cass' au centre du trio d'origine, lui donnant l'importance qu'il mérite tout en s'amusant comme un petit fou des pouvoirs de régénération extraordinaire de notre vampire préféré. Il en profite également pour discourir sur le machisme ordinaire de Custer, un machisme pas si méchant que ça puisque motivé par l'amour et la peur de perdre Tulip. Une façon futé pour affirmer la force de caractère (et l'habilité à l'auto-défense) de Tulip. 

    Le scénariste finit par faire intervenir Le Saint des Tueurs, commence à relier les différentes histoires introduites précédemment et termine sur une note bien plus intimiste. Les deux derniers numéros, #25 et #26, raconte l'histoire de Cassidy. On sent ici bien davantage l'implication personnelle de Garth Ennis dans le récit, lui aussi d'origine Nord-Irlandaise. Il raconte la guerre civile de 1916 à Dublin, la futilité de la lutte et les nombreux loups qui se sont repus de la mort de jeunes garçons plein d'idéalisme. En mêlant Cassidy à la lutte pour l'indépendance, Garth Ennis finit de bâtir un personnage exceptionnel, à la fois habité par son sentiment de patriotisme bafoué mais, également, par l'horreur du temps qui passe. Devenu vampire, Cassidy traverse les époques, perd ses amis et connaît la solitude. Devant le ciel étoilé New-Yorkais, Cassidy et Jesse se font témoins du temps passé, jetant à New-York un Je t'aime plein de mélancolie et de tendresse. Cassidy trouve définitivement sa place dans l'aventure, et offre par la même occasion l'une des scènes les plus fortes du comic book. Ces fiers Américains aussi prompts à se foutre de la gueule des français que du passé peu glorieux de leur pays, ces fiers américains valent leur pesant d'or.

    Avec ce second volume toujours aussi maîtrisé, bourré de folie, d'idées hilarantes (le chat et Cassidy, le Messie demeuré...), de sous-textes hérétiques et, forcément de vrais moments d'émotions, Preacher continue sa route sanglante et jouissive. Une immense et glorieuse réussite qui donne envie de boire du whisky et de monter tout en haut de l'Empire State Building.  

      

    Note : 9.5/10

    CITRIQ

    Critique du Tome 1

    Disponibles également aux Editions Panini :

    [Critique] Preacher, tome 1

    [Critique] Preacher, Tome 2 

    Suivre l'actualité du site :

    Abonnez-vous à la page Facebook   

    Littérature

     Suivez sur Twitter :

    Cinéma


    Tags Tags : , , , , , , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :